La Fille du Sud entre au Panthéon Battue d'une courte tête à Compiègne par Mormona pour sa deuxième intrusion dans les handicaps Quintés, La Fille du Sud, sous les couleurs de la Gousserie Racing, a bien fait de persister dans cette catégorie puisqu'elle s'est octroyée dimanche un premier trophée dans le Prix du Panthéon. Allante dans la descente et pas forcément des plus heureuses, la future lauréate a bénéficié du génie de Mickaël Barzalona pour se retrouver non loin des animateurs au moment de l'emballage final avant de venir défier victorieusement Mykiss aux abords du dernier hectomètre.Philippe Decouz, son entraîneur, vous embrasse très fort ! Berkane, troisième, passait une tête à Matauri Gold qui n'a jamais quitté la corde, tandis que Thunderspeed s'affichait en bout de combinaison. Avec La Fille du Sud, à l'accent marseillais, préparée par un mentor du Centre-est devenu Cantilien, c'est un peu la route des vacances qui défilait jusqu'au deuxième poteau de l'hippodrome de ParisLongchamp. Comme si l'été nous ouvrait enfin ses bras...
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Hohneck prive Etonnant d’un succès historique Etonnant pouvait entrer dans l’histoire des courses normandes en remportant le Prix des Ducs de Normandie (Grp. II) pour la troisième fois. Ce qu’aucun trotteur n’était parvenu à réaliser jusque-là. Mais, muni de quatre petits alus et pisté après un kilomètre de course par un Hohneck déferré, l’élève de Richard Westerink a dû déposer les armes après la mi-ligne droite et céder cette dernière préparatoire avant l’Elitlopp au champion de Philippe Allaire. Intenable depuis le début de la saison, Hokkaido Jiel s’intercalait entre les deux épouvantails de ce sommet caennais. La revanche de l’Atlantique a tenu ses promesses et elle n’avait rien de Pacifique à quinze jours d’un Groupe I suédois dans lequel Etonnant entend conserver sa couronne. Les Scandinaves redoutaient un Français. Leurs craintes sont multipliées par deux.
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Glory of Rome la judicieuse supplémentation Carla O’Halloran mérite la gloire ! Car elle a du nez la professionnelle de Chantilly qui, au dernier moment, a changé son fusil d’épaule et le programme de Glory of Rome. Un instant pressenti au Croisé-Laroche le 21 mai, le fils de Sixties Icon était finalement supplémenté pour participer au Prix de l’Aqueduc mercredi à Fontainebleau. Certes le poteau des 1200 mètres semblait un peu lointain pour ce vrai sprinter, alors Fabien Lefebvre a parfaitement joué le coup en se positionnant dans le sillage de Drogo, le favori, pour lui porter l’estocade à 150 mètres du but. Troisième, et n’échouant que d’une tête dans la lutte pour l’accessit d’honneur, Mino Pico, énormément raccourci pour l’occasion, donnait raison à Romain Le Dren Doleuze, alors que Good Friend et Big Freeze officialisaient un peu plus loin l’arrivée d’un Quinté sans véritable surprise. Certains diront qu’il faut faire du passé table rase. Pas toujours ! Il y a dix-huit mois, en effet, Glory of Rome s’était déjà imposé sur ce parcours à une valeur nettement supérieure. Il méritait donc de figurer au Panthéon de la Solle.
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Johnny Charron le Rock‘n Hurdler Il lui aura fallu atteindre la quarantaine pour remporter son premier Groupe I avec Sel Jem. Ça valait le coup d’attendre dans l’ombre des géants de la discipline puisqu’il s’est glorifié d’un Grand Steeple-chase de Paris. A deux semaines de l’édition 2023 des plus beaux 6000 mètres de l’obstacle, Johnny Charron, actuel deuxième du Top Jockey, aborde sa résurrection et les grands hommes qui l’ont construit.
Quarante deux ans. Toujours là. Meilleur que jamais. Au franc-parler intact. Au firmament dune passion qui ne s’est jamais élimée. Ainsi va Johnny Charron. Un rocker des courses qui prend soin des chevaux comme un autre Johnny astiquait sa guitare. Un personnage. Un vrai. Le genre de mec qui vous marque. Qu’on n’oublie pas. C’est chez lui, en Charente-Maritime, que nous l’avons rencontré. Entouré de ses plus fervents supporters. De son petit neveu, de son grand neveu, de son fils, d’une de ses sœurs dont chacune ne raterait pour rien au monde les aventures du frangin. Chez les Charron, rien n’est plus fort que les courses… si ce n’est la famille, socle essentiel d’une longévité qui en ferait pâlir plus d’un. Qui fait aussi quelques envieux. Qu’importe les sacrifices et les efforts. On pourrait croire que l’hippodrome est le lieu du mal. Que nenni ! C’est dans le off que Johnny souffre le plus. Constamment rattrapé par des problèmes de poids qui le harcèlent jour et nuit. Après un bon repas entouré des siens, pour faire le plein de gourmandises et d’énergie sous le soleil de Royan, le jockey freelance sait qu’une autre journée commence « Le poids c’est de pire en pire. Après deux heures passées avec ma famille, je n’ose même pas monter sur la balance parce que je ne me suis pas privé. Quand je quitte le boulot, que je me ressource, je m’abandonne. A leur départ, je vais me poser un peu, prendre ma douche et puis je vais aller faire du sport. C’est ainsi chaque jour. Généralement je fais juste trois quarts d’heure de vélo ou de footing. Davantage finirait par m’écoeurer, c’est en tout cas ce que me suggère mon kiné. J’enchaîne toujours sur un bain chaud et je bois énormément d’eau. Tout ça pour aller aux courses. Et quand on a la chance d’en enlever une, on gagne aussi en moral et c’est reparti pour six mois de plus ». Courte parenthèse de détente après quelques lots matinaux pour Guillaume Macaire et Hector de Lageneste. Monsieur Macaire, comme il l’appelle. Comme pour ajouter une particule à ce que les courses ont construit de plus notable. Un entraînement qui a fait d’un bon pilote, un jockey exceptionnel. Un gagnant de Grand Steeple-chase de Paris l’an passé avec Sel Jem. Un premier Groupe I après deux décennies où les angoisses se sont presque quotidiennement confrontées aux bons moments. Pieux, Métais, Gombeau, Berra, Hondier,... la belle époque Sel Jem, le détonateur. Ce champion charismatique qui a réveillé le crack jockey qui sommeillait en lui. Souvent aux portes du Top ten de la profession, Johnny Charron a passé un cap et le voici au terme du premier tiers de la saison hippique en seconde position dans la course à la cravache d’or derrière l’incontournable Félix de Giles. « Nous n’en sommes qu’au mois de mai, rappelle-t-il. Conclure l’année deuxième ou troisième ce serait pas mal. Si je peux ce serait même très bien, mais je ne vais rien changer à ma façon de monter en course. Je ne défoncerai jamais un cheval pour gagner un trophée. Pour l’instant j’arrive à rester deuxième sans être dur avec eux. Et cela sans traverser en long, en large et en travers la petite province. Pour ça j’ai passé l’âge. Félix, au-delà d’être un très bon jockey est un super mec. Je le respecte énormément. Humainement, dans la vie comme sur la piste je suis un vrai fan ». Et quand on connaît le Charentais d’adoption, qui n’a pas la langue dans sa poche, c’est plus qu’un compliment. Une vraie reconnaissance de talent. Car il ne s’en cache pas ! Sans être réactionnaire, pour lui, les courses c’était mieux avant. Même quand il acceptait de ne pas être au premier plan. « Récemment, j’ai revisionné une course qui se disputait il y a une dizaine d’années à Auteuil et l’on se rend bien compte que la mentalité des jockeys n’était pas celle qu’on constate aujourd’hui. Chacun respectait la place de l’autre. Dans le tournant final, on s’apercevait bien qu’on redonnait une chance au cheval et que ça se terminait dans la ligne droite sur une vraie lutte. On voyait des mecs comme Pieux, Métais, Gombeau, Berra, Hondier qui ont apporté aux courses leurs lettres de noblesse. J’ai encore en mémoire le Grand Steeple de Vieux Beaufai avec Pierre Bigot qui reprend dans le dernier tournant, quitte à perdre du temps, et qui vient aligner Or Jack et Christophe Pieux au poteau. Ça c’était des belles courses. Maintenant c’est à celui qui va arriver le plus vite au bout. Y’a moins de tactique. C’est pour ça que j’arrive encore à me faire ma place dans les pelotons. Certes je m’adapte à l’évolution de ce sport, mais je compose encore dans cette optique-là. A l’ancienne. Monsieur Macaire en a un peu profité du reste (rire) ». Ah ce Sel Jem ! Johnny en a encore les yeux qui pétillent. Il en parle comme d’un amour de jeunesse. « Quand j’ai vu que j’avais dans les mains un cheval de Grand Steeple-chase de Paris je n’ai pas loupé le coche. Dans le Prix Murat, Dream Wish était parti, il avait pris cinq ou six longueurs d’avance. Sel Jem s’était déferré, m’avait fait la faute sur la double barrière, mais je suis venu le chercher. Là j’ai compris qu’il gagnerait le Grand Steeple un mois et demi plus tard. Ce fut un grand moment. Il aurait pu être meilleur, si, quatre jours plus tard, je ne m’étais pas cassé une cervicale. J’étais encore dans l’euphorie. Je connais des cracks jockeys qui ont monté des années sans jamais réussir à gagner la course française la plus prestigieuse. Moi, je n’en étais qu’à ma troisième participation. J’aurais pu ce jour-là gagner de trente longueurs si j’avais voulu. Je me souviens du fil de cette folle journée comme si c’était hier. Je suis parti de chez ma sœur qui habite à Paris. Je me suis habillé en pingouin. Oui, j’ai mis mon costard alors que je déteste ça, puis je suis monté dans ma voiture. J’ai mis ma playlist Deezer en aléatoire et toutes les chansons qui me portent habituellement chance avant de me rendre aux courses, avec Johnny Hallyday en tête, ont défilé les unes après les autres. Je me suis dit que j’allais passer une bonne journée. Je savais que si tout se passait bien, sans bêtises de ma part, on avait toutes les chances de gagner. Quinze ou vingt ans en arrière, j’aurais surement eu plus de pression, j’aurais été tendu, mais là j’étais serein. Je n’ai jamais monté un cheval comme Sel Jem. Il adorait le travail. A 3 ans, il avait de sérieux problèmes au dos. Au fil du temps, plus il travaillait, plus il sautait, meilleur il était. C’est un peu comme si vous allez au boulot le matin en ayant mal partout et qu’à la fin de votre journée vous ne ressentez plus aucune douleur. Qu’est-ce que vous faites ? Le lendemain vous y retournez gaiment. Sel Jem c’est ainsi qu’il s’est construit. Il aimait le boulot et il avait une confiance en l’homme impressionnante. Il y avait 15 000 personnes au rond de présentation, mais pas une seule fois il a bougé. Il savait que j’étais avec lui, qu’il ne risquait rien. C’est la fabrique Macaire ça. Beaucoup de chevaux de l’écurie se présentent ainsi, posés, calmes quand ils ont le cavalier sur le dos. Faut les voir le matin sur les pistes. Dès qu’ils sont attachés, ils ne bougent pas, ils savent qu’ils vont travailler. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’ils sont rebotisés, mais c’est une éducation qu’instaurent monsieur Macaire et Hector dans leur travail. C’est ainsi qu’on crée des champions. Avec Sel Jem, je ne regrette pas de ne pas pouvoir défendre mon titre le 21 mai prochain. Ma seule vraie frustration, c’est de n’avoir pas pu gagner La Haye Jousselin que Bellino II a remporté sept fois. Quand tu réussis ce doublé, alors tu écris vraiment l’histoire. J’espère le retrouver très vite. Aux dernières nouvelles sa convalescence se passe bien. Je croise les doigts ». Rosario Baron pour un doublé ? Un autre tandem jaillit soudainement dans notre conversation. Philippe et Camille Peltier. L’un est considéré comme le sauveur, l’autre comme l’avenir de l’obstacle. « Philippe, je lui dois énormément. En 2006 j’embauchais chez lui. Je sortais de chez Etienne Leenders, j’avais perdu confiance en moi. Son jockey, David Berra, m’a également beaucoup appris. J’ai eu la chance de tomber sur Miss de Champdoux qui m’a mis un coup de pied au cul. Et Philippe a su m’utiliser. Ensuite on a eu Gold Filly, Got Away, on a fait une bonne année avec Kyalco. Si j’en suis là aujourd’hui, je peux le remercier. Et maintenant Camille se fait sa place et un prénom dans le métier. J’ai travaillé avec elle cet hiver à Pau et je peux vous dire qu’elle n’a pas besoin du padré pour gagner des courses. Elle a réalisé un super meeting. Sans aucun doute, elle représente la relève. C’est elle qui s’occupe notamment de Le Grand Jour, mon partant le 21 mai prochain dans le Prix Maurice-Gillois. Elle se donne beaucoup de mal à l’écurie et je pense que l’écurie Peltier est partie pour durer un bon bout de temps encore ». Le 21 mai, dans les entrailles de l’obstacle, la date est surlignée depuis belle lurette. Un jour pas comme un autre. Une réunion de gala et du Grand Steeple-chase de Paris. Sans Sel Jel, mais avec Rosario Baron, un partenaire que Johnny Charron vient de découvrir sur les balais de Compiègne. Un coup de poker. Une belle main préflop selon lui. « Daniela Mélé m’a appelé en me disant qu’elle allait le supplémenter à Compiègne pour sa faire un avis avant le Grand Steeple-chase de Paris. J’ai dit ok ça marche. Premier appelé, premier servi. Si vous regardez son papier, c’est un cheval qui est tout neuf. Il a été préservé. Il a passé l’hiver à Pau où il a gagné deux courses. Dernièrement, il m’a laissé une très belle impression. Il a tout d’un bon cheval et surtout un cerveau aussi gros que Sel Jem. Vous lui parlez, il répond, il est à l’écoute du cavalier, ça c’est un travail de longue haleine. Il est au bouton. Il ne consomme pas, il ne tire pas, c’est un super sauteur, parfait pour ces grands rendez-vous. Il lui faudra tenir les 6000 mètres, mais s’il m’écoute je le pense détenir une bonne chance ». Voire conserver ce titre si précieux. Longtemps resté dans l’ombre de David Berra et de David Cottin, Johnny entend désormais rester en haut de l’affiche. On lui a trop donné bien avant l’envie. Fabrice Rougier |